Notre interview pour L’Usine Nouvelle.

[Interview management] « L’entreprise libérée est le contraire des démarches de qualité de vie au travail ou d’équilibre vie privée vie professionnelles », estime Isaac Getz

Par CHRISTOPHE BYS, PUBLIÉ LE 

ENTRETIEN   Isaac Getz a publié en novembre dernier L’entreprise libérée aux éditions Fayard. Il revient dans cet essai sur les sources du succès de ce concept, sur la spécificité du manager libérateur. Il ouvre aussi de nouvelles pistes, s’interrogeant notamment sur le rôle de l’école. Et si pour libérer l’entreprise, il fallait commencer par libérer l’école ?

L’Usine Nouvelle – Vous continuez de promouvoir l’entreprise libérée. Que répondez-vous à ceux qui pensent qu’une entreprise ne peut pas fonctionner sans un minimum d’organisation ?

Isaac Getz : Qu’ils confondent la question de l’organisation et celle de la coordination. Toute activité humaine complexe où règne la division du travail demande de la coordination. Déjà, au dix-huitième siècle, Adam Smith l’écrivait. Dès lors, la question est de savoir comment coordonner au mieux, pour l’entreprise mais aussi pour les individus. Depuis la Révolution industrielle, cette question a été formulée d’une façon très particulière : comment encadrer le plus grande nombre de personnes en mobilisant le moins d’encadrants possible ? La solution à cette formulation mathématique d’optimisation est l’organisation hiérarchique.

Ce que je propose avec d’autres c’est de formuler le problème de coordination autrement, d’une façon qui change tout. Pour coordonner le travail, demandons-nous « comment l’organiser pour que les individus puissent SE coordonner au mieux ? ». J’insiste sur le SE. L’entreprise libérée est une des approches qui permet cette auto-direction des équipes et elle le fait en créant un environnement organisationnel fondé sur la confiance et la liberté.

Ceux qui pensent que l’entreprise libérée est un moyen de réduire la masse salariale ou même d’améliorer radicalement la performance économique n’ont pas vraiment saisi cette philosophie. La démarche de libération se préoccupe d’abord et avant tout de l’humain. Et s’il y a des bénéfices collatéraux – à savoir la performance économique exceptionnelle – c’est tant mieux, mais ce n’est jamais le but premier.

Par ailleurs, la libération de l’entreprise évite des dommages collatéraux, comme le désengagement généralisé ou le stress, deux phénomènes qui coûtent très cher aux entreprises. Le fond de l’entreprise libérée est le bon sens : offrir aux salariés un environnement qui remplit leur besoins psychologiques fondamentaux et du coup, leur donne l’envie de venir travailler chaque matin et donner le meilleur d’eux-mêmes. Cela étant dit, libérer une entreprise n’est pas simple—c’est une épreuve surtout au niveau du patron.

Vous pouvez lire la suite de l’entretien ici .